Buchtipp: „Requins d’eau douce“ von Heinrich Steinfest

Lafayette Livres - Buchtipp der französischen Buchhandlung in BerlinHeinrich Steinfest : Requins d’eau douce Folio policier, 420 pages, 9.05€

Malgré Pâques, nous avons eu encore le temps de lire. Oh, du léger alors nous avons pris un krimi comme on dit en Allemagne et de plus un krimi allemand. Dans notre petit sac de lecture donc « Requins d’eau douce » de Heinrich Steinfest, australo-autrichien qui habite à Stuttgart (ça commence déjà bien). L’intrigue du polar en question est assez accessoire : un type est retrouvé à moitié mangé par ce qui semble être un requin, dans une piscine (d’eau douce) sur le toit d’une résidence viennoise. Bon c’est assez tiré par les cheveux, on vous l’accorde. Mais Steinfest brille par autre chose qu’un scénario en béton armé réaliste à mort. Son coup de maître est de nous proposer un inspecteur complètement barjo vénérant Wittgenstein au point de se balader avec le « Tractatus » toujours dans sa poche (ce qui lui sauvera la vie) dont il répète en boucle quelques phrases à l’allure de mantras, il est de plus un musicologue averti passionné de Hauer, toujours amoureux de sa sœur et habitant chez ses parents à 47 ans. Pour cet homme jugé par ses pairs comme incontrôlable et fou, il n’y a pas d’énigme alors ce n’est pas cette nouvelle enquête qui va lui prouver le contraire. Le tout est parfaitement bien écrit (traduit), drôle et brillant. On sent que l’auteur se fait plaisir, frime un peu et dans le même temps ironise en créant des situations grotesques ou décalées. Si vous voulez en savoir plus, ruez-vous sur ce petit livre, excellent moment de lecture assuré.

Extrait : « C’était le père qui faisait la soupe. Pendant soixante-dix ans au moins, il n’avait jamais touché une casserole, et puis du jour au lendemain, sans raison apparente, il s’était mis à apprendre la cuisine, à faire des soupes, à recueillir des recettes et à regarder par-dessus l’épaule de quelques-uns de ses amis, cuisiniers professionnels. Dans le même temps, ce diplomate à la retraite, jusque-là extrêmement bavard, avait presque complètement cessé de parler. Il ne disait plus que le strict nécessaire. Nécessaire qui tournait autour de la préparation de la soupe du soir. A table, ensuite, il ne prononçait plus un mot, sans pour autant paraître désagréable ou aigri – il avait juste l’air concentré. Son silence ressemblait à une couronne en suspension qui entourait le mangeur de soupe de sa gloire. Un petit homme âgé sanctifié par la soupe. »